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in the land of gods and monsters
ocytocine sur pourpre de lippes, qu'haleine furieuse exalte en belle faim. rictus pourléché, au gré du satané-battant; ô perles de ruine, font gémir ces saints, quand toxines en sanglots rincent les infâmes. et galopent, en fumeuses susurres, les échos d'une plèbe soufflée par pandore.
Newport, Oregon — forum city-gangs sombre low fantasy, époque actuelle. réservé à un public mature et averti -18
museum of sins v.1 — ouverture du forum au 02.11. version design du 17.09 thème new beginning par LUX.
“ Et on les appelait mendiants ou bien voleurs suivant leur insistance à vivre. ”
trait : prudence trop grande, comme l’angoisse venue des viscères, celle de voir l’océan le trahir à son tour.
saisons : trente-quatre ans.
myocarde : aime les corps qu’il rencontre lors des soirées fauves dont il brûle ses nuits, se perd parfois dans des relations aussi courtes que vidées de substance. Éternellement, il reste mélancolique face à l’idée des amours véritables, tout en essayant de fusiller en lui l’écœurant désir d’être aimé.
besogne : longtemps marin pour les Seawolves, la perte d’un frère de cœur au cours d’un naufrage l’a depuis dissuadé de remettre un orteil sur le moindre rafiot. C’est alors comme traqueur, que les loups de mer l’ont recyclé ; sorte de Cerbère dont la malédiction est désormais d’arpenter les quais, le nez collé face à cet mer qui le nargue, le terrifie et lui manque tout à la fois.
La nuit les a enveloppés depuis un moment maintenant, d'indigo et de noir entrelacés. Au dessus de leurs crânes, la voûte s'écartèle et porte les cadavres des orages passés ; les soirées sont plus rudes, depuis que le mois de novembre a pointé le bout de son nez sur le calendrier. Ça se voit dans les carcasses qui se trainent dans la ville, dans le pas de ceux qui arpentent la cité sans autre but que celui d'aller nulle part ; qui errent avec le ventre plombé de fer, ne rêvant plus que l'oubli, l'attente de rien, qui marchent à l'infini en se demandant où se sont enterrés les songes. Il était coutumier du visage que prenait Newport, une fois la nuit tombée ; là où le masque du jour réussissait à préserver une image presqu'intacte de normalité, il ne suffisait que d'un crépuscule pour que ne s'échappent les marginaux, les laissés-pour-compte, tous ceux que les aurores ne toléraient plus sous leurs égides. La plupart des gens n'en étaient pas témoin : dans la grandeur de leurs insouciances quotidiennes, ils oubliaient en quoi la ville se transformait une fois le noir éclot et les étoiles levées, lorsque s'échappaient les rats au milieu du rien, de cette nuit qui poisse, contre les lumières qui chialaient toute la fatigue de la rue. Parfois, Oskar peine à trouver dans les contours de la cité la poésie que son iris mendie, puisqu'il en a vu les travers : ici on comprend vite que quand on est pas riche, on est plus pauvre qu'ailleurs, alors on se met à en voir un tas d'autres choses que les gens normaux ne voient pas. Les recoins, les replis, les endroits où se terrer et les murs contre lesquels se plaquent ceux qui portent la honte de n'avoir pas réussi. Il connait la Newport des jours levés, des quartiers qui jamais ne s'éteignent et brillent trop fort pour que n'apparaisse ce qui tombe d'en-haut ; mais chaque soir, il retrouve la Newport grise des docks, celle des oubliés au cœur de fer, des acharnés au sol, qui reniflent le ciel pour constater qu'en lui comme en eux, la lumière est partie. Et si l'injustice l'étrangle parfois, il n'est même plus vraiment en colère : ça aussi, il avait essayé. Mais il avait fini par se lasser de la rancoeur, qui avait fini par porter le goût fade de l'habitude.
Ils ont le pas lourd et les doigts gelés, à peine réchauffés par les gobelets de café servis par Marty (lequel tenait le seul shop dans le coin à distribuer la précieuse boisson après vingt-deux heures). Ça a le goût de pas grand chose, ou alors seulement celui de la fatigue bien chienne qui tenaille leurs carcasses ; mais c'est chaud, et c'est tout ce qu'ils demandent. Le but, c'est de tenir éveillés toute la nuit et puis de rester attentifs aux mouvements des docks ; de ne pas se laisser attraper par les clapotis de l'eau ou le silence assourdissant des cœurs endormis, parce que la moindre faille pourrait leur coûter cher. La plupart du temps, il se passe pas grand chose lorsqu'ils attendent pas de livraison ; ils se contentent de taper leur ronde et de se raconter des trucs pour tuer le temps. Oskar est reconnaissant d'avoir Sulli comme partenaire régulier : il cause ni trop, ni trop peu, et il lui ferait presqu'oublier que sa place n'est pas ici. Et si les nuits restent longues, elles sont sans doute un peu moins moroses qu'avec quelqu'un d'autre.
D'un pas lourd, Oskar s'est glissé vers le bord du quai, à flanc de mer. À quelques centimètres de ses semelles, la mer clapote doucement, réfléchissant les loupiotes des veilleuses qui ponctuent la jetée. Il s'accroupit machinalement, porte le gobelet en carton à ses lèvres pour s'y brûler la langue à grands coups de café fade. L'œil se perd vaguement dans les lignes sinueuses dessinées sur les flots et finalement, il pivote le menton vers la silhouette de son camarade, non loin de lui.
— Il parait que la cargaison de demain, c'est des containers entiers de panneaux solaires, Commente t-il machinalement, sur le ton de la conversation. « C'est Lupo qui m'a dit ça tout à l'heure, il avait l'air super fier de lui, mais j'ai pas bien compris ce qu'ils comptaient en foutre. » Un espèce de sourire vague a tordu ses lèvres, et sa silhouette s'est redressée avec souplesse, renversant la nuque vers l'arrière pour avaler la fin de son café. « Des contrefaçons, j'crois. Mais ça me fait un peu marrer qu'on donne dans l'énergie renouvelable et l'écologie maintenant, Ajoute t-il, vaguement cynique.
Quoiqu'il en soit, c'était pas vraiment son rôle de juger ce qui était un bon deal et ce qui ne l'était pas. Sa place, ça avait toujours été celui de la logistique : s'assurer qu'un truc aille d'un point A à un point B sans encombre, et pas trop chercher à comprendre ce qui se passerait après. De toute façon, ça l'intéressait pas vraiment – une des raisons, sans doute, pour lesquelles il n'avait jamais cillé face à l'illégalité flagrante de leurs actions. Dans un monde qui plébiscitait la brutalité des inégalités, fermer les yeux restait globalement la meilleure solution pour rester debout.
Mais dans le silence parfait de la nuit, l'oreille se dresse soudain face à un écho minime – sorte de claquement ferrailleux et discret venu de loin. Sûrement des ados occupés à squatter les quais au nord (le spot était connu pour servir de lieu discret de beuverie) ; mais l'essentiel de leur rôle consistait justement à ça. Vérifier. Parce qu'on les payait clairement pas à se curer les ongles sur le port, ou à papoter de la crise économique.
— T'as entendu ce truc ? Fait alors Oskar à l'intention de son partenaire, en désignant la direction en question d'un mouvement de menton.
trait : l'égaré en majesté, la (( prudence )) outrancière de son quotidien tiraillé entre ses principes et sa volonté.
saisons : s'agrippe par ses pattes depuis (( trente-cinq )) années à survivre sur ce bitume s’effondrant par le poids d’un monde à moitié crevé.
myocarde : se contente de son caveau sans chaleur bienfaitrice, se privant d’une vie et des amours qui pourraient s’offrir à lui, évite les émotions au détriment de sa survie et d’un célibat réconfortant et isolé.
besogne : une couverture pour s'assurer la faible sérénité d'un esprit tourmenté ; parmi les (( surveillants du port de plaisance )). dans l'ombre, parasite se faufilant dans les interstices des concurrents côtoyés dans une prudence menée par son indéfectible loyauté ; (( traqueur )) pour les seawolves.
district : rôdeur des quais parmi pèlerins malandrins et flâneurs songeurs, (( portview )) comme base de sa vigilance.
Hard times in violent tides Closed eyes and still frame minds
L’âme en cavale de ses regrets refoulés sous l’océan lugubre d’un noirâtre ténébreux par cette nuit abscons et vertigineuse. La fumée de son café comme un voile ondulé devant son regard éveillé malgré la nuit obscurcissant chaque recoin sur lequel ses pupilles sont posées. Buvant ici et là une gorgée comme une chaleureuse compagnie de ses membres engourdis. Or, le traqueur est sur le qui-vive de la moindre anomalie des quais en proie au silence des vagues dans un rythme consolant l’âme des égarés d’une vie terrestre malfamée. Quotidien brigadier ne le laissant jamais être sujet de tribulation lorsqu’il se doit d’être en action. Abhorre sa solitude quasi-quotidienne le laissant en proie à ses pensées funestes. Bougre marin se faufile, ombre parmi les ténèbres éclairée avec parcimonie par les constellations d’une nuit feutrée.
L’oiseau de nuit rejoint comparse nocturne sur le bord du quai, mains enfoncées dans les poches comme pour garder encore quelques effluves de chaleur de la boisson chaude ingurgitée. Compagnon apprécié lors de ses rondes où l’esprit divague entre pensées intrusives et devoir à honorer. Écoute les dires de l’acolyte d’un air interloqué « Lupo t’as dit quoi ? Des panneaux solaires ?? Est-c’qu’il avait une clope sur lui ? Souvent, quand il se la raconte en fumant, c’est parce qu’il joue sur les mots… Il voulait p’t’être pas te dire y’avait quoi derrière ces 'panneaux solaires'. » Le regard toujours vers l’horizon, laissant son compagnon finir sa caféine diluée avant de répondre à son sarcasme condensé. « Ne sous-estime pas le bail économique de l’écologie mon bon Oskar, j’y connais pas grand chose, mais ça m’étonnerait pas que ça rapporte masse de pognon. » Hypocrisie malingre dissimulée en fausse naïveté cocasse.
La ronde continuait, deux âmes accompagnées par la brume opaque d’une nuit annonçant un hiver glacial. Le silence comme troisième compagnie de leur gardiennage, s’invite soudainement tumulte froid, assemblage métallique manifeste. Tête tournée vers le bruit telle une machine manipulée. « Ouais… Sûrement des mômes. Viens. » Habitude lassante de ces adolescents venant festoyer sur ce qui était devenu leur spot de bringue alcoolisé. S’approchant de plus en plus des conteneurs superposés, Sullivan tournicote autour de lui, recherchant ce qui s’apparenterait le plus à une silhouette humaine ou des restes laissés par une potentielle bande de gamins déchirés. « Tu trouves quelque chose ? J’sens même pas un reste de bière ou de bouffe froide… » Détour instinctif, contourne l’un des conteneurs fermés pour se retrouver face à son voisin à la porte manifestement défoncée. « Oh putain… » S’arrête sous le choc de la découverte, les bras levés en signe d’alerte violemment réveillée. « Attends, attends, attends… » Chuchote alors pour son camarade qu’il cherche d’un mouvement de la main sans quitter des yeux la scène de violation, jusqu’à atteindre son bras qu’il amène férocement contre lui. Désigne de sa main libre le sol où sont jonchés le cadenas forcé et la chaîne mollement retombée. Ose quitter des yeux les objets décharnés pour croiser ceux d’Oskar dans une tentative de communication sans que les mots ne soient prononcés. Prudence martelée dans ces situations rarissimes où le danger se manifeste dans l’inhabituel.
Mouvement de tête vers le conteneur forcé, tandis que son index s'appuie contre son propre poitrail, se désignant lui-même pour s’enfoncer dans les ténèbres de l’antre forcé. « J’sais que y’a du brouillard qui s’est levé mais compte les étoiles pour moi, hein ? » Code simplifié pour ne pas trahir leurs véritables intentions de veilleurs bien formés aux autres oreilles criminelles potentiellement collées à leurs lèvres. Imagine toujours le pire, le cadet Walsh à la tempe bouillonnant déjà d'irritabilité. Cher Oskar, encore bleusaille de son nouveau statut de traqueur épinglé, se désigne donc pour empoigner sa lampe torche et vérifier que la marchandise du conteneur n’a pas été dérobée ou qu’un indésirable se cache en profitant des ténèbres pour se dissimuler. Bien que la brume se fasse toute aussi menaçante à l’extérieur d’un monde où les prédateurs attendent patiemment pour sauter sur leurs proies. Or, celles-ci étaient à l'affût de la moindre respiration incongrue.
I'm like a time bomb ticking in your head Paranoia clouding your judgement
Sullivan Walsh
Oskar Baker
a feast of greyness
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M A R M O R I S
“ Et on les appelait mendiants ou bien voleurs suivant leur insistance à vivre. ”
trait : prudence trop grande, comme l’angoisse venue des viscères, celle de voir l’océan le trahir à son tour.
saisons : trente-quatre ans.
myocarde : aime les corps qu’il rencontre lors des soirées fauves dont il brûle ses nuits, se perd parfois dans des relations aussi courtes que vidées de substance. Éternellement, il reste mélancolique face à l’idée des amours véritables, tout en essayant de fusiller en lui l’écœurant désir d’être aimé.
besogne : longtemps marin pour les Seawolves, la perte d’un frère de cœur au cours d’un naufrage l’a depuis dissuadé de remettre un orteil sur le moindre rafiot. C’est alors comme traqueur, que les loups de mer l’ont recyclé ; sorte de Cerbère dont la malédiction est désormais d’arpenter les quais, le nez collé face à cet mer qui le nargue, le terrifie et lui manque tout à la fois.
Il n'était pas taillé pour le job, et il le savait depuis le début. À défaut d'ambition ou de carrure, il n'était pas dans son caractère de se calquer à ce rôle de vigile, de se placer dans une posture défensive face aux antagonistes éventuels que le groupe pouvait craindre. S'il avait rejoint les Seawolves – ou plutôt, s'il était resté à leurs côtés depuis tout ce temps – ce n'était pas, comme d'autres, pour l'appât du gain ou d'une quelconque adrénaline, ni même pour se dégoter un statut quelconque dans une société qui n'en finissait pas de recracher les marginaux comme lui. C'était d'abord pour l'appel de la mer, et pour la place bien particulière qu'il avait trouvé sur l'océan : s'il aimait tant celui-ci, c'était qu'il réussissait à calmer ses remous intérieurs, qu'il parvenait à lisser le flot de ses émotions comme aucune autre entité (ou individu) n'était en mesure de le faire. Hissé sur la coque des navires, Oskar s'était modelé une utilité et une identité, une philosophie de l'être profondément constituante à partir de laquelle il avait paisiblement modelé son existence ; s'y était ajouté le sentiment d'appartenance à un groupe, à une fraternité palpable dont il pouvait sentir l'étreinte dans chacun des muscles de sa solitude passée. Et ce mélange exquis lui était rapidement devenu addictif (ou tout du moins nécessaire) pour continuer à se construire. Ainsi, lorsque la mer s'était confisquée à lui, on l'avait assez logiquement replacé dans une petite case voisine, suivant le pragmatisme de leurs besoins communs. Mais cloué à terre comme il l'était, il peinait à retrouver un peu du sens profond qu'il trouvait jadis dans son rôle de passeur. D'un point de vue pratique, il saisissait évidemment la nécessité du rôle qui lui avait été confié (puisque les marchandises qu'ils alignaient jalousement sur les docks auraient pu facilement devenir la cible d'autres ambitieux), mais il n'avait jamais été homme à trouver la moindre gratification dans l'expression de la violence, ou de la répression. Chien de garde était un poste qui lui convenait finalement assez mal – en dépit du fait qu'il ne soit pas mauvais pour autant ; mais perdre la compagnie de ses frères de cœur aurait été pire encore. Alors, Oskar acceptait la situation en priant chaque Dieu pour qu'un jour, la mer lui soit rendue, et que cet état ne soit que temporaire. Mais peu à peu, le défaitisme ne faisait que le gagner un peu plus, et il désespérait silencieusement de voir celui-ci changer.
Dans tout ce marasme, Sullivan était une bouffée d'oxygène, la brise qui arrosait ses poumons d'un réconfort profond. Car s'il n'oubliait jamais d'être consciencieux sur leurs tâches communes, son compère avait une manière d'aborder leur rôle de façon décomplexée, changeant le plus rustre des quotidiens en aventure joviale. Et au delà de ça, Oskar resterait toujours une réelle gratitude vis-à-vis de lui, et de la façon dont il l'avait accepté dans son giron comme un frère, sans jamais évoquer le tabou de son incapacité. Ils avaient fini par former un joli duo, tous les deux ; et jusqu'à présent, même si les incidents ne s'étaient pas multipliés, personne n'avait eu à se plaindre de leur travail. C'est alors avec l'oreille tendue qu'ils pivotent de concert le visage vers la source du bruit identifiée, sans encore déterminer s'il s'agissait d'une broutille ou de quelque chose dont il fallait s'inquiéter. Progressant peu à peu vers le ventre des docks, peuplé de hautes piles de containers colorés, ils sont finalement tombés sur la carcasse éventrée de l'un d'entre eux – un espace qu'ils savaient leur appartenir, puisqu'il était estampillés du sigle distinctif des Seawolves. Instinctivement, le cœur d'Oskar s'est alors accéléré, secoué par une adrénaline solide : il était manifeste que des intrus s'étaient introduits sur leurs terres, restait à savoir si ceux-ci étaient encore présents ou non. Et il valait mieux pour eux qu'ils retrouvent ces derniers, s'ils ne voulaient pas se prendre une bonne raclée de la part de leurs supérieurs. Dans la pénombre, son regard a alors croisé celui de son acolyte, lequel s'est désigné silencieusement de l'index avant de prononcer une phrase des plus sibyllines, d'un ton presque forcé. Une autre fois, Oskar aurait pu s'amuser des codes fric-frac inventés par Sullivan (qu'il ne comprenait d'ailleurs qu'une fois sur deux, se contentant de toute façon d'hocher la tête) ; mais la situation était trop préoccupante pour qu'ils ne perdent leur temps là-dedans. Il a alors laissé le second s'engouffrer dans les entrailles sombres de l'espace de stockage, tournant le dos à celui-ci pour garder l'œil sur les alentours. L'attention alerte, sa main se glisse à l'arrière pour saisir la crosse du flingue coincé à sa taille ; précaution machinale qui avait jusqu'à présent plutôt gardé une valeur de dissuasion – ce qui risquerait de changer d'un moment à l'autre. La cage thoracique frémissante, il a laissé son œil se balader d'un bout à l'autre de son champ de vision, balayant l'esplanade bétonnée et désertique. L'absence de vacarme dans son dos indiquait que les intrus devaient déjà avoir déserté le container tout juste forcé – ce qui n'était pas exactement une bonne nouvelle – et d'un coup léger, il a tapoté la ferraille colorée de la paroi pour alerter Walsh.
— Tout va bien là-dedans ?
Les mots n'avaient pas fini de quitter sa bouche qu'un nouveau bruit métallique – plus fort cette fois – a résonné un peu plus loin, parvenant à ses oreilles en un écho distordu.
— Sulli, là-bas côté quai ! Lance t-il avec précipitation, assez fort pour être certain que l'autre l'entende depuis le ventre du cube.
Et sans plus de bavardages, il s'est élancé à toute allure dans les corridors formés par les piles de métal. Le froid de la nuit lui glace le visage et les joues, mord le corps qu'il offre à la course et à la nuit ; la direction est vaguement hasardeuse, mais il n'a pas le choix que de suivre son instinct pour le moment. Au dessus de son crâne pulsent les lueurs crasses des lampadaires au rythme de son cœur, de ses yeux agités qui dissèquent les environs à la recherche du moindre mouvement. Et finalement, ceux-ci finissent par trouver une silhouette assombrie qui détale plus loin à l'allure d'un lapin traqué. Il bifurque brusquement en sa direction, manque de se casser la gueule sur un morceau de tôle abandonné, mais regagne du terrain en poussant un peu la vitesse. Manque de bol pour le type, celui-ci finit par s'engouffrer dans un cul de sac et par piler sec devant un mur de ferraille. Alors, Oskar s'arrête à l'embouchure du couloir, coinçant le coursier qui se retourne d'un mouvement agité. Le bras se lève, la pointe du flingue braqué sur la silhouette ; et si celui-ci ne tremble pas, à l'intérieur c'est la panique. Parce qu'il espère de toutes ses forces que la dissuasion sera assez forte cette fois encore, qu'il n'aura pas à fléchir le doigt, à enclencher la gâchette.
trait : l'égaré en majesté, la (( prudence )) outrancière de son quotidien tiraillé entre ses principes et sa volonté.
saisons : s'agrippe par ses pattes depuis (( trente-cinq )) années à survivre sur ce bitume s’effondrant par le poids d’un monde à moitié crevé.
myocarde : se contente de son caveau sans chaleur bienfaitrice, se privant d’une vie et des amours qui pourraient s’offrir à lui, évite les émotions au détriment de sa survie et d’un célibat réconfortant et isolé.
besogne : une couverture pour s'assurer la faible sérénité d'un esprit tourmenté ; parmi les (( surveillants du port de plaisance )). dans l'ombre, parasite se faufilant dans les interstices des concurrents côtoyés dans une prudence menée par son indéfectible loyauté ; (( traqueur )) pour les seawolves.
district : rôdeur des quais parmi pèlerins malandrins et flâneurs songeurs, (( portview )) comme base de sa vigilance.
Hard times in violent tides Closed eyes and still frame minds
Compagnon d’infortune apprécié duquel il souhaite naïvement le préserver. Ses sens aguerris par plusieurs années à ce poste que son comparse venait tout juste d’expérimenter. Prend alors la main de ce qui pourrait être considéré comme une prise de risque cependant détournée dans son esprit comme une tentative de prudence aguerrie. Que l’atmosphère se déleste de cette pesanteur alourdie par cette inconnue glaçant ses nerfs amoindris. Conteneurs familiers, priant que leur ferraille résonne en toute fraternité malgré l’obscurité englobant sa vision devenue traître par les ténèbres noyant l’environnement océanique. Lampe torche armée, l’autre main empoignant revolver mal-aimé. Yeux sollicités à leur paroxysme, cherchant la moindre anomalie au milieu des piles entassées de cargaison malfamée. Lumière lui montre la voie, se rapproche alors furtivement de cartons démantelés. Un rapide coup d'œil suffit à faire les comptes : la marchandise ne manque pas. Mais quelqu’un cherchait à récupérer son bien. « C’est quoi encore cette merde… » chuchoté comme pour tenter d’y trouver une solution inopinée. Bruit de ferraille résonne brutalement lui faisant détourner le regard de surprise vers l’extérieur avant de comprendre par son intervention qu’il s’agissait du collègue venant aux nouvelles. Soupir mi-soulagé, mi-harassé, glisse de nouveau dans l’obscurité, les yeux sur un plafond aussi infini que le néant qui l’engloutit. « Franchement, j’saurais pas dire… » Renifle lassement ce je-ne-sais-quoi d’harassement.
Puis arrive l’étonnement pantois. Un appel précipité concernant une intrusion dorénavant manifeste. Pulsions de l’action activité. Sort précipitamment du conteneur avant de faire un demi-tour stratégique afin de le refermer, au mieux, en attendant de comprendre le désordre qui y règne sans pour autant y conclure le signe d’un vol formel. Se remet alors précipitamment à rattraper son retard. Course poursuite mettant à l’épreuve son endurance malgré un physique en proie à sa légèreté affaiblie face au froid mordant l’épiderme à l’air libre. Suit aveuglément son comparse, davantage au fait de l’anomalie que lui. Lorsque malotru se retrouve piégé au fond d’un cul de sac tel un rat à l'échine recroquevillée. « Putain… Le café tiède t’donne des ailes… » craché en saccadé par sa respiration exténuée tandis qu’une main tapote son épaule en guise de remerciement apprécié d’avoir appréhendé leur sprinter nocturne suspecté. Tente de reprendre peu à peu le contrôle de ses poumons surexploités en analysant l'individu pris au piège ; à peine sorti de l’adolescence, filiforme bonhomme les deux mains en avant comme pour se protéger de leur menace nébuleuse. “J’ai rien volé, j’vous jure, j’ai rien volé !” Étonnement feinté, hausse les sourcils face à cette défense émis dans le fracas de l’insécurité. « Pourquoi tu pars du principe qu’on va t’accuser de vol ? J’te trouve bien méfiant pour quelqu’un qui n'a rien à s’reprocher. » Gringalet tremblant dont la silhouette semblait fusionner avec le mur, répétant sa litanie agaçante “j’ai rien volé” inlassablement, tandis que le traqueur se rapprochait toujours plus de sa silhouette pourtant presque aussi grande que la sienne.
Coup d'œil à son coéquipier toujours en garde et à l’affût du moindre mouvement brusque. « T’en penses quoi ? » Une seconde suffit pour que le garnement lui fasse perdre l’équilibre, mais dans sa chute, emporte vaurien de ses mains aux doigts agrippants ses épaules qu’il balança contre le sol gelé. Violence inopinée, conclu son jeu de traître par un coup de poing sur la tempe finissant par mettre k.o. le suspect, dégringolant l'arrière de sa tête sur le bitume glacé. Respiration saccadée par cette micro-surprise de véhémence physique, renifle bruyamment son irritation entremêlée d'un choc latent dû à ses réflexes frénétiques. « Oh le con… » Poitrail tambourinant cette injection d'adrénaline abhorrée. Serre les dents d'agacement, cerveau débordé des pires scénarios attablés si leur suspect s'était échappé. Appelle son compagnon d’un mouvement de la main tandis qu’il adosse mollement l’accusé inconscient sur le mur. « Aide-moi à l’fouiller. Le conteneur était en bordel, j’pense il cherchait quelque chose qui était caché d’dans… » Penser dans ces circonstances atténuantes au doute tatoué sur ses mots débités, penser est-il l’allié ou le concurrent des traqueurs chargés de la sécurité des cargos à la finance blindée ?